Pourquoi les clubs espagnols dominent l’Europe.

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Quelques jours après la finale espagnole en coupe de l’UEFA, une évidence s’impose, les clubs espagnols dominent le football européen depuis quelques années. Cela peut paraître paradoxal dans la mesure où la péninsule ibérique est confrontée à une importante crise économique. Mais sur le plan sportif les clubs espagnols ne semblent jamais avoir été aussi performants dans la liga de « los records ».

Observateur attentif du football ibérique,  je vous fais partager mon opinion sur les raisons de cette telle domination le tout illustré de photos choisies pour la circonstance.

Le palmarès de l'Atletico de Madrid derrière un but du stade Vicente Calderon.

Le constat : les clubs espagnols dominent l’Europe.

Le palmarès des dernières éditions des compétitions européennes est assez révélateur : sur les 6 dernières années nous avons 3 victoires espagnoles en ligue des champions, et 3 victoires en coupe de l’UEFA soit la moitié des titres en jeu. En coupe de l’UEFA cette domination est particulièrement flagrante puisque sur les 9 dernières éditions nous avons 5 victoires espagnoles (Seville deux fois, l’Atletico de Madrid deux fois, Valence une fois, et deux finales 100% espagnoles (2004 Seville – Espagnol de Barcelone et 2012 Atletico de Madrid – Athletic Bilbao). Cette saison 2011-2012, aurait pu couronnemer de la domination espagnole avec deux finales 100% espagnole, si le FC Barcelone et le Real Madrid avaient remporté la demi finale dont ils étaient favoris.
L’Espagne, c’est 15 finalistes européens depuis 2000, l’Angleterre 10, l’Italie 5, l’Allemagne 4, la France 2 (Monaco en ligue des champions et Marseille en Coupe de l’UEFA en 2004 ) .

L'emblème de l'Athletic de Bilbao finaliste de la Coupe de l'UEFA 2011-2012. Photo sous licence CC de mahatsorri's.

Les raisons de la domination :

  • Une aficion sans équivalent.

L’aficion, ce sont les fans, les supporters, les fidèles d’un club. L’immense force des clubs espagnols est de posséder une base de supporters fidèle de génération en génération qui suivent et soutiennent leur club. L’importance de cette base de supporter est la base de tout. Elle permet de générer en plus des importantes entrées au stade des revenus indirects considérables : la vente de produits dérivés, mais aussi et surtout des droits TV particulièrement élevés (même s’ils sont très inégaux) qui permettent à ces clubs d’engranger d’importants revenus. En effet, des clubs comme l’Atletico de Madrid, le Betis Seville ou le FC Valence sont des clubs particulièrement suivis en capacité de réaliser un important audimat, et incite donc les opérateurs à payer cher pour télédiffuser ces matchs.

A ce niveau, il y a clairement une similitude entre l’Espagne et l’Angleterre.La différence entre les deux pays se fait à mon sens au niveau de la pérennité des structures.
En effet, en Angleterre le système, très capitaliste aboutit à une certaine instabilité économique liée au rachat des clubs dans des perspectives principales financières. Ceci fait que l’important potentiel de fans des clubs anglais n’est pas forcément réinvesti au niveau sportif (l’exemple des Manchester United ou Liverpool est à ce niveau très intéressant). Ceci n’est pas possible à Madrid, Bilbao et Barcelone puisque tous les 5 ans le Président doit passer par le vote des socios, ce qui constitue un levier puissant à l’investissement sportif. Les autres clubs importants (Seville, Valence, Atletico Madrid, Espanyol pour ne citer que ceux qui ont atteints une finale européenne) ont en général une présidence très stable.

L'emblème du FC Seville, double vainqueur de la Coupe de l'UEFA. Image sous licence CC de Rguerra.

  • Deux locomotives le FC Barcelone et le Real Madrid.

Même s’ils trustent les titres et vampirisent les droits TV, le FC Barcelone et le Real Madrid constituent des têtes d’affiche sans équivalent. Ces deux clubs sont devenus de véritable marques mondiales capable d’intéresser toute la planète.
Cela bénéficie indirectement aux autres clubs à la fois en terme de vente de droits TV (le match du dimanche midi, décalé spécialement pour l’Asie) mais également en raison des échanges économiques qu’ils peuvent avoir avec les autres clubs. Ainsi, lorsque le Real Madrid achète à prix d’or Sergio Canales au Racing Santander, ou Sergio Ramos au FC Seville, tandis que le FC Barcelone fait venir David Villa de Valence ils dépensent des dizaines de millier d’euro. Ces importants transferts permettent d’injecter de grosse sommes dans le reste des clubs faisant une sorte de keynésianisme économique. Même si cela est parfois subi, ainsi la saison passée les dirigeants de l’Atletico Madrid n’avaient qu’une crainte, c’était de voir partir Kun Aguëro au Real Madrid pour 60 millions d’euros…

  • La connexion naturelle avec le football sud américain.

Si tous les grands clubs européens disposent de recruteurs en Amérique du sud, l’Espagne constitue le pays privilégié d’arrivée et d’intégration de ces derniers en Europe. Les exemples sont très nombreux, mais Agüero, Messi, Higuain se sont parfaitement adaptés au football espagnol bien qu’arrivés très jeunes. Cela permet ainsi aux clubs espagnols de s’appuyer sur des joueurs talentueux qui apportent un supplément de talent qui fait souvent la différence dans les joutes américaines.

  • La meilleure culture technique d’Europe.

Autre élément, peut-être décisif pour assoir leur domination, les clubs espagnols possèdent à la fois au niveau défensif la rudesse du calcio, (à ce niveau de nombreux entraîneurs ont fait la navette entre les deux championnats, (Hector Cuper, Pelegrini, Mourinho, Guardiola qui a joué dans le Calcio, Simeone…) et une culture  offensive basée sur la technique et le jeu en toque (avec des variantes, mais cela est tout de même très prégnant). Ceci offre un niveau de jeu sans égal avec en porte étendard la sélection composée quasi uniquement de joueurs évoluant en Liga.
A mon sens, c’est ce qui a permis aux clubs espagnols de balayer cette saison les clubs anglais en coupe de l’UEFA (Valence qui domine Stoke City, Bilbao qui élimine Manchester United) et d’autant dominer la compétition (3 demi finalistes sur 4…).

Stade de l'Espanyol de Barcelone double finaliste de la Coupe de l'UEFA. Image sous licence CC de Panotxa.

La menace du découplage avec l’économie du pays ?

Pourtant, en dépit de cette domination, tout n’est pas rose en Liga. De nombreux clubs sont financièrement sur le fil du rasoir en dépit des bonnes performances sportives, ainsi l’Atletico de Madrid connaîtra un déficit de 10 M€ en dépit d’une bonne saison sportive.
Cette situation a pour conséquence des retards de paiement des salaires, ce qui a abouti à une grève des joueurs lors de la première journée de championnat, les radios sont interdites de stade en raison de leur refus de payer des droits audiovisuels et les petro dollars semblent également de plus en plus présents (et selon moi ce « dopage financier » n’est pas forcément une bonne chose à moyen terme, j’en parlerai peut être dans un futur article). Le football professionnel espagnol ne peut être indéfiniment découplé de la réalité économique.
A voir s’il continue à défier les lois de l’économie ces prochaines saisons en dépit de ses nombreux atouts…

Yannick, le Docteur ès sport.

>> A lire également sur mon blog:

– Soir de match, Atletico de Madrid – RCD Mallorca.
– Les radios espagnoles vont-elles devoir payer pour retransmettre les matchs de Liga ?

 

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