L’Angleterre, nouveau modèle du sport d’élite français ?

Lyon éliminé par Manchester, Marseille et Toulouse humiliés par Liverpool, quatre clubs anglais en quart de finale de la champion’s league de football et voilà que pour de nombreux médias français l’Angleterre devient l’exemple à suivre en matière de sport de haut niveau. On vante l’environnement fiscal du sport professionnel anglais, son attractivité auprès des investisseurs internationaux et la fidélité de son public…

La déroute des clubs français en compétitions européennes de football a pris une telle ampleur que le secrétaire d’Etat chargé des sports, Bernard Laporte a mandaté illico le secrétaire d’Etat à la prospective Eric Besson pour réaliser une étude sur le sujet pour proposer des pistes qui permettront de rivaliser.

Au delà de la dimension caricaturale de la situation, l’on peut clairement s’interroger si la Grande Bretagne est réellement un modèle à imiter tant ce pays est marqué par l’absence de pluralisme au niveau du sport de haut niveau.

Voici notre éclairage sur ce débat différent de ce que l’on a l’habitude d’entendre ou lire.

L’Angleterre, eldorado du football et du rugby.

Une chose est évidente, c’est que l’Angleterre est l’eldorado du football et du rugby. C’est presque normal finalement puisque c’est le pays berceau de ces deux sports.

Il est clair que tant du point de vue de la puissance financière que du palmarès international, les clubs anglais occupent une place majeure en Europe (il est difficile de parler de palmarès international en rugby pour les clubs dans la mesure où ce sport est schématiquement pratiqué dans seulement deux pays, la France et l’Angleterre, un peu à l’image de la pelote basque pratiquée en France et en Espagne…).

Le foot, le rugby et le désert anglais ?

Par contre, si l’on prend les autres sports collectifs majeurs, force est de constater que c’est le désert quasi complet. Pas ou peu de professionnalisme et une présence dans les compétitions européennes réduite à la portion congrue.

Par exemple, qui connaît les London Malory qui ont dominé le volley anglais ces dernières années, le Manchester Handball ou l’Olympia HC de Londres qui sont les ténors de l’actuel championnat anglais de handball (totalement amateur il faut le préciser) ou Lancaster qui a dominé ces dernières saisons le championnat d’Angleterre de water-polo.
Il convient de préciser que dans ces sports, l’Angleterre ne participe en général pas aux compétitions européennes de club ou que les clubs engagés (le champion en général) ne participent pas aux ligues des champions.

La situation du basket est un peu différente puisque les clubs anglais avaient (modestement) pointé le bout de leur nez dans les années 90 (notamment avec les London Towers), mais de désistement en banqueroute, le basket anglais est en totale déconfiture avec comme actualité une guerre des ligues privées opposant l’actuelle ligue majeure la BBL à une ligue (la BBA) en cours de création par un groupe d’investisseurs (parmi lesquels l’ancien Lakers AC Green). Pour l’anecdote le champion en titre de la BBL est l’équipe des Newcastles Eagles.

En Angleterre les sports collectifs sont cannibalisés par le football.

Lorsque l’on voit le niveau d’amateurisme des autres sports hors football et rugby en Angleterre l’on peut légitimement s’interroger sur l’intérêt de suivre ce modèle.
Ce constat laisse également pensif sur l’argument de la concurrence fiscale si souvent mis en avant pour expliquer la performance des clubs anglais. En effet, pourquoi en handball, en basket ou volley les clubs anglais n’utilisent pas cet avantage si important pour se développer et conquérir l’Europe ?

Tout simplement parce qu’en Angleterre le football cannibalisme les autres disciplines sportives à un degrés sans équivalent en Europe. Ces dernières n’arrivent pas à se faire une place et à attirer public, médias et sponsors et sont condamnées à la confidentialité.

Préserver le pluralisme du modèle français.

C’est pourquoi la France n’a pas a rougir en matière sport collectif face à l’Angleterre. Et quand l’on repense aux exploits de Limoges en basket (champion d’Europe 1993), de Paris (champion d’Europe en 2001) et Tours (finaliste en 2006) en volley ou Montpellier (champion d’Europe 2003) en handball l’on se dit que le France peut être fière des performances de ses clubs dans les sports collectifs majeurs.

Donc que souhaite t’on que la France devienne à l’instar de l’Angleterre un pays à mono activité sportive d’élite ou au contraire que l’on cultive le pluralisme sportif, facteur de diversité culturelle.

L’enjeu est majeur et il est posé au secrétariat d’Etat au sport qui dispose des leviers de réponse…

Yannick, Docteur ès sport.

=> l’article déjà parus dans Docteur ès sport sur le pluralisme du sport à la télévision qui constitue un levier d’action important à ce niveau.

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